NOTE D’INTENTION > GIGI BIGOT

« Peau d’âme »

         Au départ, il y a mon étonnement devant l’existence dans toutes les cultures du monde, de contes « renversants». Renversants au sens où ils défient toute logique, où ils font fi de la réalité, et renversants au sens où le public se retrouve lui aussi sens dessus-dessous, prêt à toutes les aventures. Renversants …. comme la complexité de l’être humain.

         C’est ce va-et-vient qui m’intéresse : va-et-vient entre le possible et l’impossible, entre le vrai et l’imaginaire, entre la toute-puissance et le dérisoire, entre l’humour et l’émotion. A la fois cette conscience d’être « enfermé » dans le temps, dans l’espace, dans l’agir … et parallèlement, cette capacité par le rêve, à se jouer de toutes les limites, à « s’évader » !

         D’où mon intention de m’orienter vers une écriture engagée dans le rapport à l’enfermement et la résistance face à cette situation. Ensuite, le déclic : Mechtild Gilzmer, historienne allemande, rapporte dans son ouvrage « Camps de femmes 1939 – 45 » que les internées de Rieucros en Lozère ont choisi, pour dire leur situation, de mettre en scène un conte, celui de Blanche-Neige . Ce fait réel m’a confortée sur l’à-propos de ma recherche et mon
intuition à vouloir mettre en correspondance enfermement et contes merveilleux … pour dire mieux :

l’horreur et l’espoir
la vie et l’anéantissement
la solidarité et la solitude
la peur et le désir

         Enfin, je voulais faire un spectacle d’aujourd’hui, pas seulement historique, d’où l’idée de rebondir sur le terme d’ « indésirables », expression utilisée pour désigner les étrangères internées dans les camps de Rieucros et de Brens (Tarn). Les gens du voyage m’ont paru correspondre à cette appellation d’ « indésirables » autant par le regard posé sur eux, encore à notre époque, que par ce qu’ils ont subi pendant la dernière guerre mondiale.
Pour conclure, j’ai souhaité travailler avec une musicienne afin de porter le spectacle en tant que femme, et avec Michèle Buirette en particulier à cause de son aisance à utiliser l’espace et de sa facilité à se glisser musicalement et oralement dans la parole conteuse.

Gigi Bigot.